La Vérité vous rend libres (Jn 8 , 32) “Que la paix du Seigneur soit toujours avec nous …”
Nous, Conférence Episcopale de Madagascar, réunis avant la célébration de l’érection de l’Archidiocèse de Tamatave, avons partagé sur la situation qui prévaut dans notre pays. Nous avons eu une pensée particulière à propos du grand Jubilé du 50ème anniversaire de l’Indépendance de la Nation.
Nous avons déjà transmis un certain nombre de messages depuis le début de la crise, notamment notre demande insistante, au nom du patriotisme, de tenir la parole donnée (cf. lettre Mars 2009).
Aujourd’hui nous voulons proclamer, que répandre partout l’argent et les mensonges pour accéder au pouvoir, n’est pas une solution ; cela ne fait qu’engendrer la violence qui peut mener jusqu’aux massacres.
Au fond du gouffre…. Le Peuple :L’insécurité règne partout, des familles sont divisées, le chômage augmente, les divergences au niveau politique entrainent des troubles, des stupéfiants de tous genres se répandent partout. Certains médias se détournent de leur vocation d’information en attisant des passions qui pourraient déclencher une guerre civile. L’armée, dernier rempart de la nation, a été également éprouvée ces derniers temps.
- Les Politiciens:
Le dialogue est bloqué car personne ne veut plus écouter l’autre à cause de suspicions et d’une haine mutuelle. En conséquence personne ne recherche le bien commun, et le patriotisme perd de la vigueur.
- Chrétiens et hommes de bonne volonté
Les églises se sont aussi enfoncées dans ce tourbillon. Leurs dimensions prophétiques, leurs rôles de communion et leurs missions de guides ne sont plus visibles.
Essai de sortie de crise… Insuccès - Politiques
Il y a eu certain nombre de recherches de solutions mais aucune n’a abouti. Au contraire la situation semble être bloquée (Le Hintsy, GIC, dialogue des quatre mouvances à l’étranger...)
Aucun succès à toutes les propositions politiques avancées pour résoudre cette crise. Cela nous alarme dans la situation où se trouve le pays actuellement. La médiation internationale est nécessaire, mais tout le monde constate qu’elle est bien limitée, car c’est nous Malagasy qui sommes à l’origine de ce problème, et il n’y a que nous qui pourrons trouver la vraie solution..
- Diverses Associations
Certains veulent prendre leur responsabilité dans la situation de blocage actuelle. Ils font des déclarations et manifestent dans leur recherche de solutions, mais au lieu d’éclaircir la situation cela engendre des confusions au sein de la société, au niveau politique et au même au sein des églises. Nous rappelons ici qu’au nom de leur citoyenneté et de leur foi chrétienne, c’est leur droit et leur devoir d’exprimer leur opinion en toute liberté. Toutefois nous sommes préoccupés d’un risque d’instrumentalisation de la foi chrétienne, ce qui est contraire à l’enseignement de l’Eglise Catholique.
Propositions et exhortations…C’est à la veille de la célébration du cinquantenaire de notre indépendance que nous devons faire face à cette situation très difficile. Certains seraient tentés de déclarer que rien n’a été accompli depuis l’indépendance. C’est une façon trop simpliste de voir la réalité car beaucoup de progrès ont été réalisés, pour ne citer que le développement des écoles, des hôpitaux, de l’habitat, de la communication et des transports… Nous sommes reconnaissants à ces nombreux patriotes qui ont collaboré au sein du Fihavanana pour réaliser ces grands progrès au service du bien commun.
Il faut aussi reconnaître qu’il y a eu beaucoup d’échecs, cela nécessite aujourd’hui la solidarité de tous pour que nous puissions atteindre la paix, fruit de cette célébration.
Nous, vos Evêques, nous insistons que nous devons mettre tout notre poids pour la concrétisation des points suivants :
- La Conversion :Comme nous l’avons souligné lors du dernier message de Carême : « Convertissez vous et croyez à l’Evangile ». Si nous voulons vraiment redresser la vie de la nation nous devons reconnaître nos fautes et abandonner l’égoïsme et la jalousie pour faire régner la justice, et mettre en pratique, par tous les moyens, l’amour de notre patrie et la recherche du bien commun.
- Ny fihavanana:
Le Fihavanana, cette sublime valeur de la culture Malagasy, est bien malade. C’est l’amour de l’argent et la recherche démesurée de la gloire qui en sont l’origine. Cela exige une solution urgente et claire non seulement au niveau politique mais dans la recherche d’une vraie communion et d’une vraie solidarité dans le respect des droits de l’homme, dans la vérité et dans la charité que le Christ nous enseigne.
- Engagement
L’Eglise Catholique n’a pas de projet politique à proposer et ne cautionne aucun pouvoir. Nous souhaitons vivement par contre que cette période de transition s’achève rapidement dans la dignité. Cela requiert de la part de chacun un engagement et une prise de responsabilité dans la sagesse et dans la vérité.
Nous voulons tous une élection transparente. Cela exige la participation de tous dans son organisation pour que sa réalisation soit parfaite. Cela nous mènera vers une structure stable et durable pour le bien des générations futures.
Conclusion« Bénis, Seigneur notre île » C’est par cette prière contenue dans notre hymne national que nous tenons aussi à vous bénir et à vous présenter déjà nos vœux pour les prochaines festivités du jubilé de l’indépendance. Nous vous exhortons à prier pour notre pays. Nous confions ensemble à Notre Dame de l’Immaculée, Patronne de Madagascar, tous nos efforts pour le progrès de notre pays pour que nous vivions dans la paix.
Nous, Evêques, nous vous bénissons.
Antananarivo le 28 Mai 2010